Esplanade Riel à Winnipeg, un magnifique pont reliant les gens et les cultures
Le pont cycliste et piétonnier Esplanade Riel relie par-delà la rivière Rouge le quartier francophone de Winnipeg, Saint-Boniface, et le cœur de la métropole manitobaine. Devenu l’un des symboles visuels les plus connus de Winnipeg, cet élégant pont conçu par l’architecte franco-manitobain de réputation internationale Étienne Gaboury vise aussi le rapprochement des communautés francophone et anglophone de la ville, qui habitent chacune « de l’autre côté de la rivière » comme le veut l’expression consacrée winnipegoise. L’architecte Gaboury a aussi conçu le pont routier Provencher juxtaposé à l’Esplanade Riel. Guidé par le même objectif, il a dessiné sur ses flancs des motifs représentant la diversité des origines culturelles des fondateurs de Winnipeg – autochtone, française, britannique et métisse –, entrelacés comme les fils d’une ceinture fléchée. L’Esplanade Riel, un pont haubané en semi-harpe, le seul au monde à abriter un restaurant en son centre dans le but de favoriser les rencontres, éblouit les piétons qui le traversent et fait la joie des photographes.
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Une attraction inédite
En décembre 2003, lors de l’inauguration de l’Esplanade Riel, le directeur des Travaux publics de la Ville de Winnipeg, Jim Thomson, déclarait que circuler sur ce pont donnait l’impression de « marcher dans une cathédrale en plein air ». De partout, le long de la rivière Rouge, cet étonnant assemblage pyramidal de couleur blanche pique la curiosité et attire comme un aimant. Une fois rendu au seuil du pont, on veut l’emprunter, se glisser sous l’enchevêtrement esthétique des câbles de soutien et profiter des particularités de cette structure unique : le grand restaurant vitré central, sa haute tour élancée, l’impact aérien des câbles qui se déploient en des perspectives variables. Ce pont est en soi une attraction.
Depuis 2014, l’architecture remarquable du Musée canadien pour les droits de la personne, le bâtiment voisin de l’Esplanade Riel sur la rive ouest de la rivière Rouge, ajoute à l’image de carte postale que composent ces deux chefs-d’œuvre vus de la rive est. L’Esplanade Riel fait le pont entre le secteur récréotouristique de La Fourche, le Lieu historique national du Canada de La Fourche et le Musée canadien pour les droits de la personne, sur la rive ouest, et le quartier francophone de Saint-Boniface, sur la rive est, où débouche l’Esplanade Riel. Les piétons peuvent alors suivre le boulevard culturel et commercial Provencher ou la promenade Taché, qui donne accès au Musée de Saint-Boniface, le plus vieux bâtiment du Manitoba, ainsi qu’à la cathédrale de Saint-Boniface et à son cimetière, où Louis Riel est enterré.
Un audacieux projet franco-manitobain
À la fin des années 1990, plusieurs organismes de développement économique de Saint-Boniface élaborent des projets de revitalisation du quartier francophone qui souffre d’un certain isolement par rapport aux principaux secteurs résidentiels et commerciaux de Winnipeg. Parmi ceux-ci figurent deux projets majeurs : la réfection du vieux pont routier Provencher, devenu désuet, et l’ajout d’un lien piétonnier attractif reliant Saint-Boniface au centre-ville de Winnipeg.
La communauté franco-manitobaine se mobilise pour démontrer son dynamisme et sa créativité par un projet marquant qui aurait valeur de symbole et susciterait la fierté. Le réputé architecte Étienne Gaboury répond présent et conçoit un projet audacieux, d’une grande beauté, qui se distinguera de tout autre pont piétonnier. Il collabore avec la firme Wardrop Engineering pour assurer la faisabilité de la structure novatrice qu’il propose, à un seul pylône central incliné soutenant les haubans porteurs. La réfection du pont routier Provencher et son élargissement se font en parallèle. Celui-ci est achevé en 2003, quelques mois avant l’ouverture publique de l’Esplanade Riel. Ces deux projets font partie d’un ensemble d’initiatives visant à embellir et à redévelopper l’ancien centre-ville industriel de Winnipeg, situé en bordure de la rivière Rouge, un secteur aujourd’hui très fréquenté par la population et les touristes.
Le choc et le rapprochement des cultures
La sélection du nom Esplanade Riel est le fruit d’un concours lancé auprès de la communauté franco-manitobaine. Il a été choisi en l’honneur du grand leader métis Louis Riel, pendu pour haute trahison en 1885, mais réhabilité depuis comme figure politique d’envergure et cofondateur de la province du Manitoba. Les Franco-Manitobains ont voulu ainsi ancrer ce projet novateur dans leurs racines historiques et affirmer leur identité francophone. Ce choix a été accepté de bon gré par la communauté majoritaire canadienne-anglaise et pluriethnique de Winnipeg, quoiqu’avec quelques grincements de dents. On n’efface pas facilement les tensions ethnolinguistiques de longue date. Néanmoins, au final, le projet a largement atteint les objectifs que poursuivait Étienne Gaboury et les organismes de développement économique de Saint-Boniface, qui étaient de favoriser le rapprochement entre les communautés et de stimuler l’économie du quartier.