C’est certainement l’une des grandes ambassadrices du Manitoba. Autrice reconnue pour sa maîtrise de l’art du récit, sa profonde humanité et sa prose limpide*, Gabrielle Roy a dépeint avec justesse les paysages de sa province natale, qui ont marqué son imaginaire d’enfant et de jeune adulte.
Voyageons sur les traces d’une géante de la littérature canadienne, au Manitoba où elle a grandi, avec un saut au Québec où elle a vécu.
La Maison Gabrielle-Roy de Saint-Boniface
C’est un arrêt inévitable : le musée du 375, rue Deschambault. La maison d’enfance de Gabrielle Roy a résolument été une source d’inspiration. Elle revient souvent dans ses écrits, en particulier dans le recueil Rue Deschambault.
On doit cette Maison Gabrielle-Roy à un groupe de bénévoles soucieux de préserver ce lieu de mémoire, construit par les parents Roy en 1905. Il y a une vingtaine d’années, le groupe lui a redonné l’allure qu’elle avait en 1918.
Vous retrouverez donc dans cette jolie résidence jaune, avec une grande véranda et une corniche, le décor de l’enfance de Gabrielle Roy.
Sara Ayala, qui y travaille comme guide pour la première fois en cet été 2022, aime beaucoup la cuisine, comme intacte. «Lorsqu’on lit ses livres, on se rend compte que toute la famille Roy se rencontrait dans la cuisine, dit-elle. Gabrielle Roy a passé beaucoup de temps ici avec ses sœurs et ses frères.» La cuisine offre une incursion dans la vie familiale des Roy.
La lucarne du 3e étage, où l’auteure aimait se réfugier et lire, exerce aussi une fascination sur Sara Ayala. Gabrielle Roy décrit cet endroit à profusion dans les livres que Sara a lus à l’école.
Le saviez-vous?
Avant son ouverture au grand public, en 2001, la maison a évité un déménagement au Québec en étant désignée site patrimonial provincial. Par la suite, elle est devenue un lieu patrimonial national. Des plaques de Parcs Canada et du Conseil manitobain du patrimoine sont aménagées sur le site. La Maison Gabrielle-Roy fêtera ses 20 ans d’ouverture en 2023.
Pour découvrir l’endroit à distance : le site de la Maison Gabrielle-Roy propose des visites virtuelles, même des balados!
Circuit littéraire Gabrielle-Roy dans Saint-Boniface
Ce n’est pas étonnant, Saint-Boniface présente bien d’autres lieux de mémoire. Nombre d’eux sont regroupés dans un circuit littéraire, conçu par le célèbre artiste et architecte franco-manitobain Étienne Gaboury (celui qui a veillé à la réfection de la résidence Roy en vue d’en faire un musée).
Le circuit passe devant l’étonnante et magnifique cathédrale de Saint-Boniface (détruite par le feu en 1968, et dont la devanture d’origine abrite aujourd’hui un bâtiment signé… Étienne Gaboury). Une des plaques rappelle ici la beauté de la plume de Gabrielle Roy. Tout près, reposent Léon Roy et Mélina Landry, ses parents.
D’autres plaques d’acier se dressent devant l’ancienne Académie Saint-Joseph, que Gabrielle Roy a fréquentée, et devant l’école Provencher, avenue de la Cathédrale. L’installation ici plus grande rappelle une classe ou un théâtre, deux endroits que Gabrielle Roy aimait bien.
Pour découvrir le quartier où a grandi Gabrielle Roy, un circuit consacré au quartier Saint-Boniface est logé sur l’application mobile Baladodécouverte.
En 2019, la journaliste Camille Gris Roy a suivi les pas de Gabrielle Roy à Saint-Boniface. C’est à lire ici!
Sur la route, les paysages du Manitoba
De 1929 à 1937, Gabrielle Roy a été institutrice. Elle enseignera un an à Marchand, un an à Cardinal, puis séjournera huit ans à l’Institut Provencher de Saint-Boniface, avant de s’envoler pour l’Europe en 1937.
Sur la route, depuis Saint-Boniface, il y a Somerset, un village de 450 personnes, où elle a passé les étés de son adolescence, chez son oncle maternel. C’est ici qu’on retrouve le musée Gabrielle-Roy. Des reproductions de lettres écrites par l’auteure, des objets d’époque et un triptyque peint par Michelle Dufault-McEwan occupent l’espace du petit centre culturel. «C’est très petit», décrit Gisèle Rondeau.
Gisèle Rondeau a vécu presque toute sa vie à Somerset. C’est dire comment elle connaît la route entre son village natal et Winnipeg – une route parfaite pour découvrir les plaines. De la Maison Gabrielle-Roy au musée de Somerset, les gens d’la place comptent 1 h 45 de route. C’est l’occasion de découvrir le Manitoba francophone et rural — Gisèle Rondeau suggère de passer par Saint-Claude. Fin juillet, le colza, le blé et le lin font exploser les jaunes et les verts et le ciel ajoute au tableau ce bleu caractéristique des plaines.
La route :
De Saint-Boniface, prenez la route de Saint-Claude (la 2 ou la Red Coat Trail). Besoin d’une pause? Il y a ici le musée du lait. Ensuite, prenez la direction de Notre-Dame de Lourdes, qui a aussi son musée, dédié aux pionniers. Juste après Cardinal, la route d’Altamont — la 23 — se déroule comme un long ruban. À l’est, il y a Altamont et la montagne Pembina, à l’ouest, Somerset. «C’est très droit, c’est très plat», décrit Gisèle Rondeau : comme un décor des Prairies.
Avant d’arriver à Somerset, St-Léon dresse de grandes éoliennes, auxquelles on dédie un centre d’interprétation. Puis vient le village de Somerset, avec sa rue principale, son petit musée et son resto, où tout le monde se retrouve.
Vous pouvez d’ailleurs faire cette route à vélo!
En vous arrêtant au resto de Somerset, demandez les indications pour atteindre le sommet de la côte, au nord du village. Vous y verrez 30 km à la ronde, jusqu’à Bruxelles — d’où vient l’artiste Étienne Gaboury. Un must, selon Gisèle Rondeau.
L’été, le musée Gabrielle-Roy de Somerset est ouvert le mardi et le jeudi de 14 h à 18 h et le mercredi de 11 h à 18 h. L’hiver, il est ouvert les mardi, jeudi et samedi. Si ça ne concorde pas avec votre passage, sachez que vous pouvez visiter les lieux sur demande en communiquant avec le Centre.
Gabrielle Roy a enseigné brièvement à l’école de la Poule d’Eau – Waterhen. Si vous avez envie de rouler trois heures de plus dans les champs, en direction nord, vous trouverez la rivière de la Poule d’Eau, qui se jette dans le lac Manitoba.
Au Québec
Gabrielle Roy quittera l’Ouest pour s’établir au Québec en 1939. Elle vivra d’abord à Montréal, dans le quartier ouvrier Saint-Henri, à Québec et à la Petite-Rivière-Saint-François.
Rivière-St-François, dans Charlevoix, a été un lieu d’inspiration pour l’auteure. Elle y a passé 25 étés, de 1957 à son décès en 1983. Dans sa petite maison au bord de la falaise, elle écrivait. L’endroit sert maintenant de résidence d’artistes. Tout près, sur le mont Gabrielle-Roy un sentier porte aussi le nom de l’auteure. C’est l’occasion d’une randonnée modérée, au dénivelé de 562 m et à l’aller retour de 11,4 km, soit environ 4 heures de marche — qui se parcourt en raquette l’hiver.
Gabrielle Roy a passé les 30 dernières années de sa vie à Québec — au Château St-Louis, un édifice de 11 étages construit en 1925 sur la Grande-Allée. Ici comme ailleurs, une plaque souligne la présence, jadis, de l’auteure. C’est à quelques minutes de marche du Vieux-Québec, tout près du parlement.
À Montréal, la Place du Bonheur-d’Occasion a pris vie en 2018, rue Rose de Lima, entre les stations de métro Place-St-Henri et Lionel-Groulx. Bonheur d’occasion, premier roman de Gabrielle Roy et premier grand roman urbain canadien, est inspiré du quartier. C’est à Saint-Henri que s’est installée l’auteure lorsqu’elle a quitté le Manitoba.
Revenons au parc du Bonheur-d’Occasion. En plus d’une plaque commémorative, des bancs, œuvres de l’artiste Assia Zaidi, portent des citations du roman phare de la littérature québécoise — et canadienne-française.
Pour en savoir plus
Beaucoup de biographies de Gabrielle Roy existent, en ligne, notamment dans l’Encyclopédie canadienne. On le lit partout, l’autrice, féministe, réaliste, a remporté son lot de prix prestigieux, au Canada comme à l’International pour ses Bonheur d’occasion, Rue Deschambault et Ces enfants de ma vie. Ces oeuvres et son autobiographie, La détresse et l’enchantement, sont disponibles en ligne à la bibliothèque des Amériques, gratuite d’accès, moyennant une inscription.
Bien entendu, le site de la Maison Gabrielle-Roy propose une chronologie et une biographie.
Découvrez les artistes franco-manitobains
Vous souhaitez sauvegarder cet article ou le mettre de côté pour le lire plus tard? Enregistrez-le sur Pinterest!
*sa maîtrise de l’art du récit, sa profonde humanité et sa prose limpide : ça vient des plaques du Canada qui lui sont consacrées.