Gravelbourg, au centre du patrimoine francophone en Saskatchewan
La petite ville de Gravelbourg possède un impressionnant ensemble de bâtiments classé lieu historique national du Canada en raison de sa grande importance pour l’implantation des francophones en Saskatchewan. L’exceptionnelle cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption, le couvent Jésus-Marie, l’évêché, le collège Mathieu et les résidences de la famille Gravel témoignent tous du dynamisme des francophones qui s’établissent à Gravelbourg à partir de 1906. Leurs descendants, qui forment 25,5 % de la population (selon le recensement de 2016), continuent de mettre en valeur la culture française et l’héritage des pionniers qui ont fait de Gravelbourg un centre de formation en français de haut niveau, en milieu rural, où plusieurs meneurs des communautés fransaskoises et francophones d’autres provinces du Canada ont reçu leur formation.
Pour en savoir plus…
Mettre en valeur l’élan et l’héritage des fondateurs
Le patrimoine bâti de Gravelbourg illustre de façon exemplaire un phénomène récurrent dans les provinces de l’Ouest, soit le rôle central des prêtres missionnaires catholiques dans l’implantation des communautés francophones. Ce qui distingue Gravelbourg – et, dans une moindre mesure, quelques villages des environs – d’autres communautés rurales de la Saskatchewan est la volonté du prêtre Louis-Pierre Gravel d’en faire un centre culturel catholique français d’envergure provinciale. En une quinzaine d’années, il réussit à faire venir des centaines d’immigrants, en majorité canadiens-français, et à doter la ville de trois institutions d’enseignement : le Jardin de l’enfance, le Couvent Jésus-Marie et le Collège Mathieu, ce dernier étant affilié à l’Université d’Ottawa. Il fait ainsi de Gravelbourg le centre de l’éducation supérieure en français de la province, qui rayonnera dans tout l’Ouest durant la première moitié du 20e siècle. La construction de l’impressionnante église Sainte-Philomène en 1919 complète son projet d’envergure.
Le Musée de Gravelbourg et District, ouvert tous les jours en été, expose cette histoire par une collection de souvenirs de la famille Gravel et de nombreux objets d’époque qui illustrent la vie quotidienne des habitants de Gravelbourg. Le Musée organise aussi des visites guidées de la cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption et des sites historiques de la ville dans les deux langues officielles.
Perpétuer la tradition francophone
Le français est encore très présent à Gravelbourg, qu’on surnomme le bijou culturel de la Saskatchewan, tant dans les commerces et à la radio communautaire qu’en éducation. La population peut s’y instruire en français du niveau primaire jusqu’au niveau postsecondaire, toujours dispensé par le Collège Mathieu. Au Centre culturel Maillard, construit en 1995, l’Association communautaire fransaskoise de Gravelbourg et l’Association culturelle franco-canadienne de la Saskatchewan organisent des spectacles, des concerts, des pièces de théâtre et des activités communautaires pour préserver la langue et la culture françaises et rassembler les francophones. Des services et des activités culturelles bilingues, comme le Théâtre Renaissance Gaieté ou le Festival du solstice d’été, qui se déroule dans la semaine du 21 juin, sont également proposés.
Une histoire édifiante
En 1906, lorsque le prêtre séculier Louis-Pierre Gravel arrive sur les rives de la rivière La Vieille pour y fonder une paroisse sur l’une des concessions offertes par le gouvernement, plusieurs personnes y résident depuis peu, notamment des francophones rassemblés autour d’Edmond Gauthier. L’abbé Gravel, originaire du Québec, œuvrait jusque-là à New York, où il retourne pour convaincre de pauvres travailleurs canadiens-français d’opter pour la vie saine de la campagne, sur les terres fertiles où il veut réunir un grand nombre de catholiques francophones afin qu’ils préservent leur identité et mènent une vie meilleure. L’abbé Gravel, nommé agent d’immigration du gouvernement canadien en 1907, la même année où il fonde officiellement Gravelbourg, est un brillant prédicateur. Par des articles de journaux et des conférences, en sillonnant les États-Unis, le Québec et l’Ontario, il recrute des centaines de candidats prêts à s’établir à Gravelbourg et dans les environs.
En 1915, il fait venir de Québec les enseignantes de la congrégation des Religieuses de Jésus-Marie, qui ouvrent un couvent. Il obtient ensuite une charte du gouvernement provincial pour créer un collège catholique francophone, le Collège Mathieu. Appuyé par le clergé et les habitants de Gravelbourg, il amène le chemin de fer et fait construire une gare, un palais de justice et un hôpital, sans oublier l’église monumentale qui devient une cathédrale en 1930, quatre ans après la mort de l’abbé Gravel, quand la création du diocèse de Gravelbourg confirme que cette municipalité est le centre de la collectivité francophone en Saskatchewan. D’ailleurs, cette cathédrale, visible à des kilomètres à la ronde, est probablement l’héritage le plus remarquable de l’abbé Gravel.
Dessinée par l’architecte Joseph-Ernest Fortin, elle est considérée comme l’une des plus belles, sinon la plus belle église des villes et villages franco-catholiques des trois provinces des Prairies. Reconnaissable à ses tours jumelles couronnées de coupoles, elle est un mélange des styles roman et renaissance italienne. Monseigneur Charles Maillard en a peint le magnifique décor intérieur entre 1921 et 1931.