Beaumont, la volonté de préserver son patrimoine francophone

La ville de Beaumont, située à cinq kilomètres au sud d’Edmonton, a été fondée en 1895 par des colons canadiens-français attirés par la richesse des terres agricoles de la région. Située en périphérie d’Edmonton, Beaumont connaît depuis quelques années une forte croissance démographique, essentiellement anglophone, mais la municipalité tient à conserver son visage francophone. Pour maintenir et raviver ce patrimoine, Beaumont a préservé quelques bâtiments remontant à la fondation du village, quand les Canadiens français composaient la grande majorité de sa population. Elle a aussi instauré une politique de requalification du centre-ville afin de mettre l’accent sur l’héritage francophone, qui transparaît notamment dans une abondante toponymie française ainsi que dans les bâtiments construits avec des toits cathédrale, considérés de style francophone. Beaumont est aussi l’une des seules municipalités officiellement bilingues en Alberta.

Pour en savoir plus…

Un village canadien-français

Beaumont est un bon exemple de communautés francophones établies dans les Prairies canadiennes au tournant du 20e siècle, quand des dizaines de milliers d’immigrants canadiens et étrangers s’implantent sur des terres agricoles. Le prêtre colonisateur Jean-Baptiste Morin attire d’abord une vingtaine de familles canadiennes-françaises provenant du Minnesota, aux États-Unis, où elles avaient émigré à partir du Québec. En 1898, le village naissant compte quelque 75 familles, dont 45 sont de langue française. En 1921, des 125 familles qui habitent au village, 110 sont de langue française. En 1960, la moitié des 400 familles vivant à Beaumont sont encore francophones. Aujourd’hui, dans cette ville d’environ 15 000 habitants, une minorité de 5 % est toujours de langue maternelle française et quelque 2000 personnes se déclarent bilingues (anglais-français).

Mettre en valeur l’héritage francophone à Beaumont

Beaumont s’efforce de préserver et de mettre en valeur son patrimoine francophone. Les noms de plusieurs rues du centre-ville rendent hommage aux fondateurs : Bilodeau, Brassard, Chalifoux, Rivard, Blanchard, Bonin, Poirier, Brunelle, Masson, Bouchard, Moreau. Les toponymes soulignent également les racines francophones de la municipalité : Soleil boulevard, baie Caillou, école Bellevue, plaines Royer (Jean Royer a choisi le nom de Beaumont pour le village) ou parc Gobeil. En ce qui concerne le patrimoine bâti, on projette de déménager dans le parc Beacon la maison historique Saint-Jacques, l’ancienne maison de ferme de la famille Saint-Jacques construite en 1912, afin de favoriser sa préservation et sa mise en valeur. La grange patrimoniale Gobeil a été déplacée en 2016 sur le site Agricultural Society Fairgrounds. Quant à la pittoresque maison d’Alfred Dubord, construite en 1919 tout près de l’église du village, elle a bénéficié d’un programme de préservation en raison de son importance pour l’histoire locale après que son propriétaire eut pris sa retraite comme agriculteur.

Depuis 2016, le restaurant Le Chartier, qui reprend le nom de Louis Chartier, l’un des premiers colons à s’installer à Beaumont avec Pierre Bérubé et les familles Goudreau, Magnan et Charbonneau, propose un menu traditionnel canadien-français dans une ambiance rustique. Ce projet a bénéficié d’une campagne de sociofinancement qui témoigne du soutien populaire accordé à la valorisation du patrimoine francophone à Beaumont. L’un des récents maires, Camille Bérubé, un francophone originaire de Beaumont, a beaucoup fait pour la conservation et la mise en valeur du patrimoine francophone de sa municipalité. L’une des résolutions qu’il a pilotées exige que tous les nouveaux bâtiments du centre-ville soient construits avec des toits de style cathédrale qui s’harmonisent avec l’architecture d’origine francophone. De plus, il a créé une association regroupant les municipalités francophones de l’ensemble de l’Alberta, qui a pour but de promouvoir leur patrimoine.

L’un des bâtiments les plus emblématiques de Beaumont, l’église originale Saint-Vital construite en 1895, a été la proie des flammes en 1918 et reconstruite en brique entre 1919 et 1921. Elle trône toujours fièrement au sommet de la colline du centre-ville. Le dimanche, les messes sont encore célébrées en français et en anglais.

S’unir pour durer

Dans la province de l’Alberta créée en 1905, la langue française a la vie dure et les francophones doivent se regrouper pour maintenir leur culture. À Beaumont comme ailleurs en Alberta, l’Église joue un rôle important à ce chapitre puisque langue française et religion catholique sont étroitement associées.

En 1899, des habitants de Beaumont fondent la Société Saint-Jean-Baptiste pour faire valoir leurs droits et animer la vie communautaire. Au même moment, 38 fermiers fondent la Compagnie du Moulin de Beaumont, moteur économique du village. Se greffent bientôt à ces organismes diverses associations comme les Chevaliers de Colomb (1908), les Dames de l’Autel (1920), la Ligue du Sacré-Cœur (1928), les Enfants de Marie (années 1930) et la Caisse populaire Saint-Vital (1946). Le Club dramatique poursuit ses activités de 1920 à 1956, aux côtés du Club de curling, du Beau Club et du Club Laflamme. Les habitants de Beaumont se rassemblent aussi à l’occasion avec ceux d’autres villages francophones de la région, tels Saint-Albert, Morinville, Legal, Fort Saskatchewan ou Edmonton, pour s’amuser et s’encourager.

Aujourd’hui, la Société d’histoire de Beaumont / Beaumont & District Heritage Society poursuit ce travail de valorisation du fait français. Une école française de niveau primaire, l’école Saint-Vital, a ouvert ses portes en 2014 et des écoles primaires et secondaires d’immersion française existent depuis plusieurs années. Malgré une rapide croissance urbaine, la ville de Beaumont tient à préserver son cachet rural francophone et elle prend plusieurs moyens pour y arriver.

Beaumont AB CA
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