La communauté francophone du Nunavut : petite en nombre, mais très active et bien intégrée
Le Nunavut est un vaste territoire nordique ayant obtenu son indépendance le 1er avril 1999. Auparavant, il faisait partie des Territoires du Nord-Ouest. Les Inuits forment les deux tiers de la population. La communauté francophone compte 640 personnes de langue maternelle française (selon le recensement de 2016) mais un total de 1520 personnes peuvent s’exprimer en français. Cette communauté principalement regroupée dans la capitale, Iqaluit, est très active et joue un rôle important dans cette région depuis plusieurs décennies.
Les services francophones comptent un centre d’emploi et de développement économique appelé Carrefour Nunavut, une salle de spectacle gérée par l’Association des francophones du Nunavut, une radio (CFRT 107,3), un journal (Le Nunavoix) et une compagnie de théâtre (Uiviit) communautaires, un centre de la Petite Enfance et l’école des Trois-Soleils, gérée par la Commission scolaire francophone du Nunavut. Le Réseau santé en français complète ces services. La population d’origine francophone provient en majorité du Québec, de diverses communautés francophones canadiennes et de pays étrangers. Le patrimoine fondamental de la langue française réunit et anime cette communauté dynamique.
Une communauté active bien intégrée à la majorité inuite
Les francophones sont présents parmi les Inuits du Grand Nord canadien depuis le début du 20e siècle. Des baleiniers, des commerçants de fourrure, des missionnaires et, plus récemment, des professionnels francophones et leurs familles ont fait entendre le français dans cette vaste région. Ces personnes ont donné du poids et de la visibilité au petit nombre de francophones qui vivaient et vivent toujours sur le territoire actuel du Nunavut.
Aujourd’hui, les visiteurs peuvent apprécier l’intégration des francophones à la culture et à la communauté inuite. Par exemple, lors du festival annuel Toonik Tyme, qui se déroule au mois d’avril, plusieurs francophones participent activement aux événements : course de traîneaux à chiens, concours de construction d’igloo, repas communautaires, soirées dansantes, foire artisanale et jeux traditionnels inuits.
Plusieurs activités francophones se déroulent au mois de mars, au cours du Mois de la francophonie et de la Journée internationale de la francophonie. Les Rendez-vous de la francophonie nunavoise ont pour but de promouvoir la langue française et ses multiples expressions culturelles. Banquet d’ouverture, dîner communautaire, spectacles, visionnement de films francophones, ateliers de théâtre, matchs d’improvisation et rallye Super Francourse. Durant le banquet d’ouverture, le prix Uiviit (« francophone » en inuktitut) est remis à la personnalité qui a le plus contribué à la francophonie au cours de l’année, alors que le prix Le frileux est attribué au meilleur bénévole.
Lors du Gala des entrepreneurs, un événement bisannuel, des prix sont aussi remis à plusieurs entreprises qui se sont démarquées et ont fait rayonner la francophonie économique nunavoise.
L’entreprise Inukpak Outfitting offre quant à elle des activités de plein air et touristiques et permet de s’immerger dans la culture et le patrimoine inuits en français.
Plusieurs francophones parlent l’inuktitut, une des langues inuites. Certains sont mariés à des Inuits et ont donné naissance à des enfants franco-inuits. Le Nunavut reconnaît trois langues officielles : l’inuktut (inuktitut et innuaqtun), l’anglais et le français.
Tout au long de l’année, plusieurs activités socioculturelles gardent bien au chaud l’attachement des francophones à la culture et à la langue françaises.
Quelques jalons historiques
Le gouvernement du Canada a mandaté le capitaine québécois Joseph-Elzéar Bernier pour qu’il prenne officiellement possession de l’Arctique au nom du Canada en 1904 et 1906. Le capitaine Bernier fait ensuite plusieurs expéditions pour le gouvernement, ainsi qu’à titre personnel, pour explorer le territoire et approvisionner les Inuits. Il y hiverne à quelques reprises et des membres de son équipage s’unissent à des femmes inuites.
Plus tard, les communautés religieuses à fortes composantes francophones ouvrent et dirigent des écoles, enseignent aux Inuits et fondent des paroisses, ce qui eut des conséquences autant négatives que positives. Dans les années 1970, les francophones sont nombreux à occuper des postes dans les bureaux que le gouvernement fédéral ouvre à Frobisher Bay – aujourd’hui appelée Iqaluit. C’est ainsi que naît l’Association des francophones de Frobisher Bay en 1981 – au départ pour obtenir la retransmission des parties de hockey des Canadiens de Montréal en français ! –, laquelle se transformera en Association francophone d’Iqaluit en 1987, puis en Association des francophones du Nunavut en 1997.
Le Nunavut est aujourd’hui formé des territoires les plus nordiques du Canada, à l’est et au centre du pays. Le mouvement de revendication inuit qui a mené à sa création, en 1999, tire son origine du mouvement coopératif qui prend naissance à Rivière Georges (aujourd’hui Kangiqsualujjuaq) au Nouveau Québec, en 1959. Ces coopératives inuites, qui se répandent alors rapidement, brisent le quasi-monopole du commerce que détenait la Compagnie de la Baie d’Hudson dans cette région. L’autonomie accrue que ces coopératives procurent aux Inuits débouche sur des revendications politiques. Ils demandent au gouvernement canadien de pouvoir gérer leur communauté et leur territoire à leur manière. Celui-ci se montre sensible à leur requête et accorde à ce territoire un statut politique équivalent à celui des deux territoires existant alors au Canada : le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. Le Nunavut compte 35 695 habitants en 2016.
Mieux connaître la communauté franco-nunavoise
En 2016, 640 habitants du Nunavut déclaraient le français comme langue maternelle, c’est-à-dire 1,8 % de la population totale. De plus, la même année, 1520 personnes disaient connaître assez bien le français pour tenir une conversation dans cette langue, soit une proportion de 4,3 % de la population. Ces francophones d’origine proviennent en grande majorité du Québec ou d’une autre province canadienne. L’immigration internationale francophone y est marginale, mais croissante.
L’organisme porte-parole des Franco-Nunavois, l’Association des francophones du Nunavut, a été et est toujours le moteur du développement de cette communauté, notamment sur le plan de l’éducation. En 1982, les parents francophones d’Iqaluit réclament du ministère de l’Éducation des Territoires du Nord-Ouest une offre de cours en français. Ils obtiennent en 1985 une période d’une demi-heure d’enseignement en français par jour. En 1993, la Commission scolaire de la division de Baffin et le ministère de l’Éducation des Territoires du Nord-Ouest instaurent un premier programme de français langue maternelle. En 2001, l’Association des francophones du Nunavut finit par obtenir la construction de l’école francophone des Trois-Soleils, à Iqaluit. Deux ans plus tard naît la Commission scolaire francophone du Nunavut, qui couvre le plus vaste territoire au Canada, tout en comptant le plus petit nombre d’élèves, tous inscrits à l’école des Trois-Soleils, la seule école francophone au Nunavut et la plus nordique au monde.
Le dynamisme de ce petit nombre de francophones et leur attachement à la langue française expliquent la quantité de services et d’activités en français que l’on trouve à Iqaluit.