Revivre un événement historique national : la ruée vers l’or du Klondike

La ruée vers l’or du Klondike est l’un des épisodes les plus connus de l’histoire contemporaine du Canada et, certainement, le plus fameux de l’histoire du Yukon. Chaque année, des milliers de visiteurs viennent à Dawson City pour marcher dans les pas des chercheurs d’or. Des animateurs de Parcs Canada les guident dans le Complexe-historique-de-Dawson composé d’une vingtaine de bâtiments préservés de cette époque et les plongent dans la fièvre qui animait cette ville entre 1897 et 1900. Certains vont à la Concession-de-la-Découverte en bordure du ruisseau Bonanza, où tout a commencé, ou à la Drague-Numéro-Quatre, l’un des énormes engins qui a remplacé les artisans chercheurs d’or après 1900. Plusieurs visitent le S.S. Keno, l’un des navires à aubes qui circulaient sur le fleuve Yukon, et quelques sportifs font des randonnées le long de l’exigeante piste Chilkoot que les chercheurs d’or empruntaient pour se rendre au Klondike. La mise en valeur et le succès de tout ce patrimoine témoignent de l’intérêt que suscite encore la ruée vers l’or du Klondike.

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Le Complexe-historique-de-Dawson

Située à 500 kilomètres au nord-ouest de la capitale du Yukon, Whitehorse, la ville de Dawson City est une petite localité de quelque 1365 habitants (selon le recensement de 2016) qui, à l’époque de la ruée vers l’or, comptait autour de 30 000 personnes. Celle qu’on surnommait la « Paris du nord » pour son opulence n’a connu qu’une brève période d’effervescence, car les riches filons d’or du Klondike se sont épuisés rapidement et la découverte de nouveaux gisements situés plus au nord, en Alaska, a rapidement drainé vers ce nouvel eldorado une grande partie des nouveaux arrivants. Dawson, ville champignon, a connu un déclin presque aussi rapide que l’avait été sa croissance. La période qui marque les esprits encore aujourd’hui ne s’étend que de 1897 à 1900.

La vingtaine de bâtiments qui font partie du lieu historique national de Dawson, au centre de la ville actuelle, sont regroupés dans un quadrilatère de quatre rues par quatre. Ils ont été restaurés par Parcs Canada, en partie ou complètement, et certains abritent des expositions et des services. Cet ensemble atteste de la nature initiale de la ville et de sa diversité, comme de son isolement dans le Nord et de ses liens avec les activités minières. C’est à travers ces magasins, saloon, salle de spectacle, bureau de poste, forge, salon funéraire, palais de justice et résidences que les guides-animateurs de Parcs Canada évoquent les années folles de la ruée vers l’or. Le S.S. Keno, un bateau à aubes échoué en face du centre-ville, rappelle l’importance de ce moyen de transport sur le fleuve Yukon. Le Musée de Dawson City, logé dans l’ancien édifice administratif du territoire, entièrement restauré et lui aussi désigné lieu historique du Canada, propose des expositions.

Émilie Tremblay et le patrimoine franco-yukonnais

Le patrimoine franco-yukonnais de la ruée vers l’or n’est pas abondant, même si on estime que 10 % de tous les chercheurs d’or venus au Klondike étaient des francophones. Hormis l’étude des lettres laissées par plusieurs d’entre eux dans le livre Les chercheurs d’or : des Canadiens français épris de richesse et d’aventure, de Jeanne Pomerleau, l’élément le plus visible aujourd’hui est le magasin qu’Émilie Tremblay a ouvert à Dawson City en 1913. Le « Mme Tremblay’s Store », comme on peut encore le lire sur l’édifice, fait partie du Complexe-historique-de-Dawson. Ce bâtiment de deux étages à charpente de bois, esthétique et fonctionnel, construit en 1899, évoque la ruée vers l’or en raison de son emplacement sur une rue passante, entre deux bâtiments phares de cette période : le théâtre Palace Grand et le casino de Diamond Tooth Gertie’s. Son association à Émilie Tremblay est tout aussi importante.

Émilie Tremblay, née Fortin en 1872 dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, au Québec, arrive au Yukon avec son mari, Nolasque Tremblay, en 1894. Elle serait la première femme blanche à avoir traversé le dangereux col Chilkoot. Le couple passe un hiver à Miller Creek dans une rudimentaire cabane en rondins. À Noël, Émilie envoie des invitations sur écorce de bouleau à la douzaine de mineurs qui habitent la région. Avec des provisions limitées et beaucoup de débrouillardise, elle prépare un véritable festin : lapin farci, rôti de caribou, haricots bruns bouillis, sardines du roi Oscar, pommes de terre évaporées, beurre, pain « sourdough » et pouding aux prunes. Les Yukonnais n’ont pas oublié ce mythique réveillon.

Après un voyage de trois ans dans leurs familles respectives, aux États-Unis et au Québec, le couple revient au Yukon en pleine ruée vers l’or. Il se déplace d’un site minier à un autre sans trouver fortune, jusqu’à ce qu’Émilie Tremblay ouvre son magasin de vêtements pour dames pour subvenir à leurs besoins. Femme courageuse, elle a élevé l’une de ses nièces, a été marraine de 25 enfants et s’est distinguée par son engagement social : fondatrice des Ladies of the Golden North, présidente du Yukon Women Pioneers et membre à vie des Daughter’s of the Empire. Les nombreuses médailles qu’elle a reçues pour ses bonnes actions ont été remises au musée du Saguenay, au Québec. L’école française de Whitehorse porte son nom.

D’autres francophones et la ruée vers l’or du Klondike

La place des francophones ne fait pas encore systématiquement partie du programme d’interprétation de Parcs Canada sur la ruée vers l’or, mais l’association franco-yukonnaise a repéré et documenté plusieurs faits pertinents et collabore avec Parcs Canada pour rendre leur contribution plus visible.

Le fondateur de Dawson City, Joseph Ladue (Ledoux), est un Franco-Américain né dans l’État de New York. Présent au Yukon depuis quelques années, il est l’un des premiers à apprendre la découverte d’or en 1896. Plutôt que de se lancer dans la prospection, il achète un terrain de 65 hectares au confluent du fleuve Yukon et de la rivière Klondike, le fait arpenter et vend des lots à fort prix lorsque survient la ruée vers l’or, en plus d’exploiter un moulin à scie, un magasin et le premier saloon. Il choisit aussi le nom de la ville en l’honneur du géologue George M. Dawson, premier cartographe du Yukon.

Plusieurs francophones font partie des chanceux qui font fortune. Arrivé au Yukon à la fin des années 1880, Narcisse Picotte est à bord du bateau qui ramène les premiers chercheurs d’or fortunés à Seattle en juillet 1897, un événement qui déclenche la ruée vers l’or. Picotte investit dans d’autres concessions aurifères profitables. Il est l’un des premiers à mécaniser le travail dans les puits et il procure de l’emploi à plusieurs dizaines de Canadiens français. Ses frères Émile, Frank, Moïse, Napoléon et Wilfrid le rejoignent. George Demers, quant à lui, investit ses gains dans le Yukon Telephone Syndicate afin de relier Dawson au reste du monde par le téléphone. Il participe ainsi au développement à long terme de la région.

Plusieurs francophones se distinguent dans d’autres domaines que les mines, tel Joseph E. N. Duclos, qui arrive à Dawson en 1898 et ouvre un studio de photographie. Il prend de nombreux clichés d’importance patrimoniale pendant la ruée vers l’or. Calixte Aimé Dugas est nommé juge de la Cour supérieure territoriale, la plus haute magistrature du Yukon, un poste qu’il occupe de 1898 à 1912. Il siège également au conseil territorial, veille à l’administration des affaires courantes et supervise les élections. Il s’implique dans la défense des droits des mineurs et des catholiques francophones qui, là comme dans bien d’autres régions du Canada à cette époque, sont victimes de discrimination. Joseph Omer Lachapelle est médecin et chirurgien à l’hôpital Sainte-Marie de la ville de Dawson de 1898 à son décès en 1927, en plus d’être entrepreneur. Il est aussi reconnu pour son engagement dans les causes sociales. En 1907, il est élu dans le comté de Dawson Nord. Gédéon Pépin arrive au Yukon à la toute fin de la ruée vers l’or, en 1901. Musicien de talent, il est organiste à l’église catholique Sainte-Marie. Il fonde et dirige aussile premier orchestre de cuivres de Dawson avec ses nombreux enfants. De 1898 à 1945, les sœurs de Sainte-Anne, dont la maison mère est à Montréal, fondent l’hôpital St. Mary de Dawson, puis s’occupent de son administration et de son expansion.

En 1901, quand un grand nombre de chercheurs d’or se déplacent en Alaska, le quart de la population de Dawson, qui compte alors 9000 habitants, est francophone.

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