Le Musée Saint-Joseph, à la mémoire des pionniers francophones du sud du Manitoba
Le village de Saint-Joseph est situé à 100 km au sud de Winnipeg, à une quinzaine de kilomètres à peine de la frontière avec les États-Unis. La municipalité rurale de Montcalm, qui regroupe Saint-Joseph et les villages voisins de Saint-Jean-Baptiste et de Letellier, compte environ 500 personnes de langue maternelle française, soit 36 % de sa population. Des immigrants francophones provenant principalement du Québec ont colonisé cette région dans les années 1870 et 1880. Le vaste Musée de Saint-Joseph, qui expose une grande partie des 30 000 objets de sa collection dans 24 bâtiments, s’est donné pour mission d’éclairer la vie que menaient ces agriculteurs franco-manitobains au début du 20e siècle. Les objets sont parfois présentés dans leur contexte, dans un atelier ou un magasin général, ou sont regroupés par thèmes, comme des dizaines de tracteurs et des centaines de bancs de tracteurs anciens. Ce patrimoine rend hommage aux pionniers qui ont développé l’agriculture dans la région.
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Dans les grandes plaines de l’Ouest
Pour se rendre à Saint-Joseph, on traverse le paysage typique des plaines du Manitoba, plat à perte de vue et voué à l’agriculture. L’abondance de silos et de réservoirs à grains et à légumineuses de toutes tailles que l’on trouve au village démontre que l’on cultive toujours la terre à grande échelle à Saint-Joseph et que sa réputation de « village des haricots secs » n’est pas surfaite. Saint-Joseph se distingue également par le fait qu’il se trouve au milieu du plus grand parc d’éoliennes du Manitoba.
Grâce aux vastes espaces environnants, le Musée Saint-Joseph, qui a ouvert ses portes en 1977 pour célébrer le centenaire de la paroisse, a pu s’étendre sur une superficie considérable de 19 hectares. Il comprend un ancien magasin général, une ancienne école, une chapelle catholique ukrainienne, des ateliers pour travailler le bois et le cuir, un entrepôt laitier, une étable qui s’anime lors du Festival du patrimoine, de grands immeubles où sont exposés des milliers d’objets domestiques tels que des lampes à l’huile, des pots et des bouteilles, des balances et des machines à laver primitives, et plus encore. Le Musée est particulièrement fier de sa collection d’engins stationnaires – ces moteurs utilisés pour actionner pompes, moulins à battre le grain ou bancs de scie avant l’électrification des campagnes –, l’une des plus importantes de l’Ouest canadien. Un bâtiment est aussi consacré à la culture de la betterave à sucre, un secteur méconnu de l’agriculture manitobaine qui a contribué au bien-être de plusieurs producteurs de la région jusqu’à la fermeture de la raffinerie Manitoba Sugar Company de Winnipeg en 1996.
Les deux principaux secteurs du Musée, le village historique et le village agricole, sont ouverts du mois de mai au mois d’octobre, alors que le Centre du tourisme Parent, le grand pavillon d’accueil inauguré en 2013, est ouvert à l’année. C’est là que sont exposées la collection Laurent Fillion d’appareils photographiques, qui retrace l’histoire de cette technologie depuis ses débuts au 19e siècle, ainsi qu’une sélection des plus beaux objets du Musée. Chaque année, durant une fin de semaine au milieu du mois de juin, une petite ferme, un défilé, des spectacles et de plantureux repas donnent un air de fête au site du Musée lors du Festival du patrimoine Montcalm.
Les agriculteurs francophones des prairies manitobaines
Les voyageurs de la traite des fourrures, en majorité canadiens-français, sont les premiers habitants d’origine européenne à s’établir sur le territoire actuel du Manitoba. Plusieurs s’unissent à des femmes autochtones et donnent ainsi naissance au peuple métis. Lorsque les premiers missionnaires francophones catholiques arrivent à la rivière Rouge (futur Winnipeg), en 1818, c’est avant tout pour desservir la population métisse qui s’élève rapidement à quelques milliers de personnes. Dans les années 1850, les Métis francophones constituent la majorité de la population. Mais à compter de 1867, après la création du Canada, une vague d’immigrants d’origine britannique les rejoint. De nombreux Métis se déplacent alors très loin vers l’ouest et l’Église catholique réagit à la baisse des effectifs francophones catholiques en recrutant de nouveaux colons.
Ceux qui s’établissent dans la région de Saint-Joseph au cours des décennies 1870 et 1880 proviennent principalement de la région de Montréal, au Québec, ou encore de l’est de l’Ontario et de la Nouvelle-Angleterre où ces Canadiens français avaient émigré depuis peu. Comme l’Église ne parvient pas à recruter un grand nombre de nouveaux immigrants, elle les regroupe afin qu’ils forment, ici et là, des noyaux majoritaires où il sera plus facile pour ces francophones catholiques de conserver leur langue et leur religion. À Saint-Joseph, cette stratégie a donné de bons résultats puisque aujourd’hui encore, presque un siècle et demi après l’arrivée de ces immigrants, le français est la principale langue parlée par le quart de la population environ, selon le recensement de 2016.
museestjoseph@gmail.com