Saint-Paul, centre névralgique de la région francophone du nord-est de l’Alberta
La ville de Saint-Paul située à 200 km au nord-est d’Edmonton est le centre névralgique d’une région où plusieurs francophones se sont établis au début du 20e siècle, notamment à Bonnyville, Cold Lake et Plamondon, en plus de Saint-Paul. Le musée local, les plaques historiques, les artistes et les activités communautaires organisées par la section régionale de l’Association canadienne-française de l’Alberta, qui a ses bureaux à Saint-Paul, assurent la vitalité et le rayonnement de la culture francophone dans la région. En 2016, plus de 10 % des habitants de Saint-Paul étaient de langue maternelle française et 20 % d’entre eux se déclaraient bilingues. L’école française du Sommet assure la relève et contribue à l’animation culturelle en présentant à la population le spectacle de cirque Un jour, préparé par les élèves pendant toute l’année scolaire. Saint-Paul fait aussi parler d’elle pour sa piste d’atterrissage pour objets volants non identifiés (OVNI) et son exposition sur les OVNI. Tous les visiteurs, incluant les habitants de l’espace, sont donc bien reçus à Saint-Paul.
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Bien accueillir les Terriens à Saint-Paul
En toute honnêteté, la ville de Saint-Paul reçoit plus de Terriens que d’extraterrestres. Dans le musée local administré par une équipe de bénévoles, les visiteurs peuvent parcourir deux expositions bilingues. La première est axée sur l’agriculture et comprend divers objets, de la machinerie agricole ancienne et plusieurs photos retraçant l’évolution des pratiques agricoles dans la région au cours du 20e siècle. L’autre exposition porte sur les premiers occupants de la colonie Saint-Paul-des-Métis fondée par le missionnaire Albert Lacombe en 1896. Son objectif était de procurer une terre d’accueil aux Métis qui traversaient une période sombre. À partir de 1909, ce territoire d’abord réservé aux Métis est ouvert aux colons de toutes origines et plusieurs Canadiens français viennent s’y établir. L’un des artéfacts vedettes de cette exposition est la reconstitution d’une ancienne cabane de trappeur. Des visites guidées sont disponibles pour les groupes et une chasse au trésor anime l’expérience de visite.
Les panneaux d’interprétation bilingues installés en ville par l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) portent sur divers aspects de l’histoire, par exemple la fonderie du pionnier Edmond Mailloux, ou la section #100 de la Légion canadienne mise en place au cours de la Première Guerre mondiale, ou encore le passé métis de la municipalité. Ces panneaux conçus et réalisés par l’artiste local Herman Poulin ont pour fond commun le paysage du lac Upper Therien, situé à proximité, et un dessin spécifique enrichit chacun d’eux. Parmi les activités communautaires organisées par l’ACFA, l’une des plus populaires est la cabane à sucre qui anime le Shiver Fest de Saint-Paul, un festival d’hiver qui se déroule durant la longue fin de semaine de la Fête de la famille, au mois de février. Les bénévoles de l’ACFA y proposent des boissons chaudes, un feu de camp, des jeux traditionnels et bien sûr de la tire d’érable sur la neige.
Plusieurs artistes francophones professionnels sont natifs de Saint-Paul ou de la région. Le peintre Herman Poulin, déjà mentionné ; Louise Piquette, une artiste multidisciplinaire qui s’inspire des membres de sa famille, de ses amis et de ses connaissances pour réaliser ses œuvres ; Margo Lagassé, sculpteure et céramiste ; ainsi que Crystal Plamondon, chanteuse de style country-folk. En outre, la troupe de danse Les Blés d’Or, fondée en 1973, a été la première à enseigner la danse traditionnelle canadienne-française en Alberta. Le récent développement des arts du cirque à l’école du Sommet est une initiative de deux anciens artistes du réputé Cirque du Soleil.
De Saint-Paul-des-Métis à Saint-Paul
À la fin du 19e siècle, les Métis issus des unions entre les voyageurs de la traite des fourrures et les femmes autochtones éprouvent de profondes difficultés. La chasse traditionnelle au bison n’est plus possible, car le bison a disparu. Le transport commercial qu’ils effectuaient en charrettes tirées par des chevaux est remplacé par le chemin de fer. De plus, leur implantation à Batoche, en Saskatchewan, s’est soldée par un affrontement avec les forces armées gouvernementales et la défaite des Métis a mené à leur marginalisation. Le missionnaire Albert Lacombe, qui partageait la vie des Métis depuis 1852, accablé par leurs difficultés, obtient en 1896 du gouvernement canadien l’octroi d’un territoire qui leur sera réservé, où les Métis pourront s’adonner à l’agriculture sans être inquiétés, ni rejetés.
Cette colonie de Saint-Paul-des-Métis demeure propriété du gouvernement, mais elle est cédée à bail pour 99 ans, pour la modique somme de 1 $ par année. Chaque famille métisse qui s’y établit reçoit une terre de 80 acres, du bétail, de l’équipement agricole et un accès aux terres collectives pour le foin, le pâturage et le bois. L’alcool y est interdit sous peine d’expulsion. Un an après sa création, une cinquantaine de familles résident déjà à Saint-Paul-des-Métis. Une chapelle, un presbytère, une scierie, un moulin et un internat sont construits rapidement. Les Oblats et les Sœurs de L’Assomption enseignent aux enfants. Mais des intempéries, l’incendie de l’école en 1905 et le retard du gouvernement à fournir l’aide financière promise provoquent des difficultés, puis l’échec de la colonie. En 1908, le bail est résilié et l’année suivante, à l’insu des Métis, le gouvernement ouvre ce territoire aux colons de toutes origines, à qui le gouvernement n’accorde que l’accès gratuit à la terre. Le 10 avril 1909, 450 homesteads (portions de terre) sont concédées, principalement à des Canadiens français, ainsi qu’à des immigrants venus d’Ukraine et de Grande-Bretagne et à quelques Métis supplémentaires. La communauté se développe ensuite rapidement. Elle fait notamment preuve de dynamisme en 1920, lorsqu’elle finance et construit elle-même un tronçon de 48 km de voie ferrée pour se connecter au réseau de chemin de fer canadien. En 1936, le village prend le nom de Saint-Paul, sans mentionner les Métis.
En 1967, pour diversifier son économie, cette communauté agricole innove en construisant une piste d’atterrissage pour OVNI en vue d’attirer des touristes. Depuis ce temps, les habitants de Saint-Paul sont toujours heureux d’accueillir des visiteurs, peu importe d’où ils proviennent.